Le soja (Glycine max. (L.) Merrill) est une culture légumineuse ne nécessitant pas d’engrais azoté, conduite avec peu de traitements phytosanitaires, présentant un bilan «gaz à effet de serre» très favorable et fournissant des graines riches en protéines (38 à 42 % de la matière sèche). L’eau est le principal facteur limitant de la production de soja (Merrien, 1994), en particulier pour les systèmes de culture du Sud-Ouest de la France confrontés au changement climatique (sécheresses plus fréquentes) et à la pression grandissante sur l’utilisation des ressources en eau pour l’irrigation. Un déficit hydrique imposé durant la période de remplissage des graines s’avère très pénalisant pour le rendement du soja (Pardo et al., 2015). Face à des contextes de production diversifiés et diversement contraints par l’eau, les caractéristiques de la variété prennent de plus en plus de poids (Maury et al. 2015). La démarche mise en œuvre dans la thèse repose sur trois approches bien connectées : (i) l’analyse de processus physiologiques en conditions contrôlées et le phénotypage variétal (i.e. la réponse de la phénologie à la température et à la photopériode pour une large gamme variétale), (ii) l’évaluation des interactions génotype-environnement-conduite culturale (IGEC) pour des variétés de référence au champ avec différentes dates de semis et conduites hydriques, et (iii) la modélisation dynamique des IGEC.
La réponse de 10 génotypes au dessèchement progressif du sol a été évaluée en 2017 et 2018 sur la plateforme Heliaphen. La réponse de la germination à la température a été étudiée pour caractériser les températures cardinales des génotypes étudiés. Elle a été complétée par une expérimentation en pots sur la plateforme Heliaphen, mettant en jeu plusieurs dates de semis de mars à juillet, pour étudier la réponse de ces génotypes à la photopériode et à la température. Les informations recueillies au cours de ces deux expérimentations ont permis de développer et calibrer un algorithme simplifié de phénologie (dit SPA). Des expérimentations au champ combinant différentes dates de semis et conduites hydriques ont été réalisées dans le cadre du projet Sojamip (2010-2014) et de la thèse (2017-2018). Toutes ces données, produites en Occitanie (de Toulouse à Béziers), ont permis de calibrer et d’évaluer le modèle STICS pour le soja. Le modèle a pu être utilisé pour effectuer un diagnostic a posteriori des conditions rencontrées par les génotypes au champ.
Nos résultats montrent la diversité des réponses pour une gamme représentative des génotypes de soja cultivés en Europe vis-à-vis de la photopériode, de la température et du stress hydrique. Les performances satisfaisantes de l’algorithme de phénologie ont permis d’explorer les zones de culture des variétés étudiées sous les climats actuels et futurs en France. L’étude de la réponse au stress hydrique a permis de mettre en évidence des génotypes qui maintiennent plus ou moins longtemps leur fonctionnement stomatique (types « conservateur » et « performant »). Les performances du modèle STICS ont été satisfaisantes, sauf pour la simulation du rendement et des caractéristiques du grain (huile, azote), mettant en évidence le besoin d’une adaptation des formalismes pour le soja. Le modèle a pu être utilisé pour diagnostiquer les conditions expérimentales au champ à partir d’indices de stress. Ce diagnostic a permis de montrer l’intérêt du semis précoce pour décaler le cycle du soja et ainsi réduire l’intensité et la durée des stress hydriques subis.
En conclusion, nous avons montré que l’étude intégrée des IGEC est nécessaire pour comprendre les situations auxquelles les plantes de soja ont dû faire face. Il sera nécessaire de poursuivre la démarche d’exploration en utilisant le modèle STICS pour tester de nombreuses conduites culturales et traits variétaux. Cette perspective permettra de proposer des idéotypes de soja pour les environnements contraints par l’eau en France voire en Europe. |
Soybean (Glycine max. (L.) Merrill) is a leguminous crop that does not require nitrogen fertilizer, which is grown with few pesticides, has a very good greenhouse gas balance and provides protein-rich seeds (38 to 42% of the dry matter on average). Water is the main limiting factor in soybean production (Merrien, 1994), particularly for cropping systems in southwestern France facing the context of climate change (more frequent droughts) and increasing pressure on the use of water resources for irrigation. A water deficit imposed during the seed filling period is particularly detrimental to soybean yield (Pardo et al., 2015). Facing diversified and diverse production contexts constrained by water, the characteristics of the variety are becoming increasingly important (Maury et al. 2015). The approach implemented in the thesis is based on three well-connected approaches: (i) analysis of key physiological processes under controlled conditions and varietal phenotyping (i.e. phenology response to temperature and photoperiod over a wide varietal range), (ii) evaluation of genotype-environment-crop management interactions (GEMI) for field reference varieties with different planting dates and water management, and (iii) dynamic modelling of GEMI.
The response of 10 genotypes to progressive soil drying was evaluated in 2017 and 2018 on the Heliaphen outdoor platform. The germination response to temperature was studied to characterize the cardinal temperatures of the genotypes tested. It was completed by a pot experiment on the Heliaphen platform, involving several planting dates from March to July, to study the response of these same genotypes to photoperiod and temperature. The information collected during these two experiments made it possible to develop and calibrate a simplified phenology algorithm (SPA). Field experiments combining different planting dates and water managements were carried out as part of the Sojamip project (2010-2014) and the thesis (2017-2018). All these data, produced in the Occitanie region (from Toulouse to Béziers), made it possible to calibrate and evaluate the STICS model for Soybean. The model could be used to perform a posteriori diagnosis of the conditions encountered by genotypes in the field.
Our results show the diversity of responses of soybean genotypes grown in Europe to photoperiod, temperature and water stress. The satisfactory performance of the phenology algorithm made it possible to explore the cultivation areas of the varieties studied under current and future climates in France. The study of the response to water stress made it possible to identify genotypes that maintain their stomatal functioning for a longer or shorter period of time ("conservative" vs "efficient" types). The performance of the STICS model was satisfactory, except for the simulation of the yield and characteristics of the grain (oil, nitrogen), highlighting the need for an adaptation of the formalisms for soybean. The model was able to be used to diagnose experimental conditions in the field through the calculation of stress indices. This diagnosis made it possible to show the interest of early planting to delay the soybean cycle and thus reduce the intensity and duration of water stress.
In conclusion, we have shown that the integrated study of GEMIs is necessary to understand the situations that soybean plants have faced. However, it will be necessary to continue the exploration process using STICS to be able to test many cultural practices and varietal traits. This perspective will make it possible to propose soybean ideotypes for water-constrained environments in France and possibly Europe. |