La thèse élabore une cartographie de la violence au travers d’œuvres récentes d’artistes contemporains vietnamiens, les œuvres étudiées ont été réalisées dans les deux dernières décennies et pour la plupart dans les années 2010-2020. Par violence, il faut entendre celle de l’imposition coloniale de l’Empire français, la mise sous tutelle de l’Indochine par le Japon et la tragique famine qui s’en suivit, celle de la « guerre des Américains » en parallèle d’une guerre fratricide, la violence de l’exil et l’expérience douloureuse du retour au pays natal.
A ces violences passées que les Vietnamiens cherchent à occulter, se substituent aujourd’hui celles d’un présent chargé de dépendance et de soumission. Le mot violence est appliqué à des situations extrêmement diverses, massacres, atrocités, mais il y a des violences plus feutrées, celles de la domination économique et du grand partage Orient-Occident ainsi que celles d’un Parti répressif et autoritaire.
S’y ajoute d’une part, une violence culturelle due au remplacement, dès les années 1918, du chu nôm par le quoc ngu qui devenait la langue officielle. Ce phénomène de disparition a évolué à un point tel qu'aujourd'hui, moins de cent spécialistes sont capables de lire couramment le chu nôm, ce qui fait que quatre-vingt millions de locuteurs vietnamiens n'ont pas accès à l'histoire écrite du Vietnam. D’autre part, la mondialisation accélère une uniformisation des savoirs et de la culture, ce qui représente également un réel défi pour les artistes.
Nous verrons comment les artistes réussissent à apprivoiser leur histoire ainsi que la question coloniale en la dépassant et, sans complaisance, y mêler d’autres mythologies qui ont traversé le 20e siècle, fascisme japonais, communisme, maoïsme, nazisme, capitalisme. La pensée allusive et l'expression codée sont les attributs de ces œuvres avec intention critique. Véhiculant des messages dissimulés, elles font peut-être référence à certains artistes occidentaux mais affirment leur autonomie. Offrant de nombreux niveaux de lecture, évitant le littéral, réussissent-elles à parler de manière universelle ? |
The thesis develops a cartography of violence through recent works by contemporary Vietnamese artists, the works studied were produced in the last two decades and for the most part in the years 2010-2020. By violence, we must understand that of the colonial imposition of the metropolis, the placing of Indochina under trusteeship by Japan and the tragic famine that followed, that of the « American war » in parallel with a fratricidal war, the violence of exile and the painful experience of returning to the native land.
The past violence that the Vietnamese seek to conceal is now replaced by that of a present charged with dependence and submission. The word violence is applied to extremely diverse situations, massacres, atrocities, but there is more subdued violence, that of economic domination and the great East-West partition as well as that of a repressive and authoritarian Party.
In addition, on the one hand, there is a cultural violence due to the replacement from around 1918 of chu nôm by quoc ngu, which became the official language. This phenomenon of disappearance has evolved to such an extent that today, less than a hundred specialists are able to read chu nôm fluently, which means that 80 million Vietnamese speakers do not have access to their written history. On the other hand, today, globalization is accelerating the standardization of knowledge and culture, which also represents a real challenge for the artists.
We will see how the artists succeed in taming their history as well as the colonial question by going beyond it and, without complacency, mixing other mythologies that have spanned crossed the 20th century, japanese fascism, communism, maoism, nazism, capitalism. Allusive thought and coded expression are the attributes of these works with critical intent. Conveying hidden messages, they perhaps refer to certain Western artists but assert their autonomy. Offering many levels of reading, avoiding the literal, do they succeed in speaking universally? |