Soutenance de thèse de Aurélie MURIA

Mécanismes neurobiologiques gouvernant la facilitation de la mémoire chez la drosophile


Titre anglais : Neurobiological mechanisms governing memory facilitation in drosophila
Ecole Doctorale : BSB - Biologie, Santé, Biotechnologies
Spécialité : Neurosciences
Etablissement : Université de Toulouse
Unité de recherche : UMR 5169 - CRCA - Centre de Recherches sur la Cognition Animale
Direction de thèse : Guillaume ISABEL


Cette soutenance a eu lieu mercredi 18 décembre 2019 à 13h30
Adresse de la soutenance : 118 route de Narbonne, Université Paul Sabatier, Toulouse III - salle Amphithéâtre Concorde

devant le jury composé de :
Guillaume ISABEL   MCF   Centre de Recherches sur la Cognition Animale - CNRS, Université Paul Sabatier Toulouse III UMR 5169   Directeur de thèse
Marie-Laure PARMENTIER   Directeur de Recherche   Institut de Génomique Fonctionnelle - CNRS, Inserm, Montpellier   Rapporteur
Jean-Christophe SANDOZ   Directeur de Recherche   Laboratoire Evolution, Génomes Comportement, Ecologie - CNRS Université Paris Sud UMR 9191, IRD UMR 247 CNRS   Rapporteur
Mery FRéDéRIC   Directeur de Recherche   Laboratoire Evolution, Génomes Comportement, Ecologie - CNRS Université Paris Sud UMR 9191, IRD UMR 247 CNRS   Rapporteur
Claire RAMPON   Directeur de Recherche   Centre de la Recherche sur la Cognition Animale - CNRS, Université Paul Sabatier Toulouse III UMR 5169   Examinateur
Emmanuel PéRISSE   Chargé de Recherche   Institut de Génomique Fonctionnelle - CNRS, Inserm, Montpellier   Examinateur


Résumé de la thèse en français :  

Les animaux ont la capacité d'établir des liens associatifs entre des événements distincts ou entre leur propre comportement et ses conséquences directes. Ils peuvent ainsi adapter leur comportement en s’appuyant sur de multiples sources d’information et sur leurs expériences passées. Les interactions entre congénères peuvent contribuer à moduler leur comportement. Si l’influence des congénères sur un apprentissage social observationnel a largement été abordée dans la littérature, la question de l’influence des interactions sociales sur la mémoire a été peu adressée. La drosophile est récemment devenue un modèle en neuro-éthologie pour l'étude des comportements sociaux et des mécanismes régissant l'apprentissage et la mémoire. Des travaux antérieurs chez la drosophile ont mis en évidence une mémoire dont la restitution à long terme est facilitée par la présence de congénères, la anesthesia resistant memory, ou ARM. Ce phénomène est qualifié de facilitation sociale de la mémoire (FSM) et les mécanismes sous-jacents à sa mise en œuvre sont encore inconnus. Dans ce travail, nous avons déployé une approche multidisciplinaire à différents niveaux d’analyse, du signal social à l’origine de la FSM, aux substrats moléculaires et réseau de neurones, en passant par le comportement des individus et des groupes, afin de démêler les mécanismes qui sous-tendent l’expression de la facilitation sociale de la mémoire. Nous démontrons que les performances de mémoire sont dépendantes de la taille du groupe et que le CO2 libéré par les mouches lors du test de mémoire est le signal impliqué dans la FSM. Nous avons identifié les neurones biVPN, qui transmettent des informations liées au CO2 aux corps pédonculés (MBs), (centre de la mémoire dans le cerveau des insectes) comme spécifiquement requis dans ce phénomène. Nous montrons en outre, que deux régions distinctes des MBs sont nécessaires dans la mémoire sociale et individuelle, respectivement les neurones αβ et les neurones α’β’. Enfin, nous établissons qu’une paire de neurones sérotoninergiques, les neurones dorsal paired median ou DPM, contrôlent l’expression de la FSM via des récepteurs sérotoninergiques présents dans les MBs, et que ces neurones DPM sont à la fois afférents et efférents aux MBs, laissant entrevoir une interaction fonctionnelle bidirectionnelle entre ces deux ensembles neuronaux. Une expérience d’imagerie calcique in vivo révèle que le CO2 favorise la réponse des DPM à l’odeur associée aux chocs (le CS+) par rapport à l’odeur non associée aux chocs (le CS-) chez des mouches conditionnées, suggérant une augmentation de la discrimination mnésique des DPM en réponse au CO2. L’ensemble des résultats obtenus nous permettent de proposer un modèle de la facilitation sociale de la mémoire dans lequel le CO2 est le signal déclencheur de la FSM via la voie neuronale « biVPN> αβ> DPM> αβ ». Dans une perspective écologique, cette étude révèle que les variations locales de la concentration en CO2 peuvent avoir un impact non négligeable sur les processus cognitifs chez les insectes.

 
Résumé de la thèse en anglais:  

Animals have the ability to establish associative links between distinct events or between their own behaviour and its direct consequences. Thus, they can adapt their behaviour based on multiple sources of information and past experiences. Interactions between conspecifics can participate with behaviour modulation. While the influence of conspecifics on observational social learning has been widely discussed in the literature, the influence of social interactions on memory has been poorly addressed. Drosophila has recently become a model in neuroethology for the study of social behaviours and mechanisms governing learning and memory. Previous work in Drosophila has demonstrated a memory whose long-term recall is facilitated by the presence of conspecifics, the anesthesia resistant memory, or ARM. This phenomenon is referred to as social facilitation of memory (SFM) and the mechanisms underlying its implementation are still unknown. In this work, we deployed a multidisciplinary approach at different levels of analysis, from the social signal at the origin of SFM, to molecular substrates and neural networks, as well as the behaviour of individuals and groups, in order to define the mechanisms underlying the expression of social facilitation of memory. We show that memory performance is dependent on the size of the group and that the CO2 released by the flies during the memory test is the signal involved in the FSM. We have identified biVPN neurons, which transmit CO2-related information to mushroom bodies (MBs), (memory centre in insect brains) as specifically required in this phenomenon. We also show that two distinct regions of MBs are necessary in social and individual memory, respectively the αβ neurons and the α'β' neurons. Finally, we establish that a pair of serotoninergic neurons, the paired median dorsal neurons or DPM, control the expression of FSM via serotonin receptors present in MBs, and that these DPM neurons are both afferent and efferent to MBs, suggesting a bidirectional functional interaction between these two neuronal groups. An in vivo calcium imaging experiment shows that CO2 promotes the response of DPMs to shock-related odour (CS+) versus non-related odour (CS-) in conditioned flies, suggesting an increase in memory discrimination of DPMs in response to CO2. All the results lead us to propose a model for the social facilitation of memory in which CO2 is the trigger signal for SFM via the activation of the "biVPN> αβ> DPM> αβ" neural pathway. From an ecological perspective, this study reveals that local variations in CO2 concentration can have a significant impact on cognitive processes in insects.

Mots clés en français :Mémoire, Neuro-génétique, Comportement, Réseaux neuronaux, Imagerie in vivo, Drosophile,
Mots clés en anglais :   Memory, Neuro-genetic, Behaviour, Neural networks, In vivo imaging, Drosophila,