Dans le circuit primaire des réacteurs à eau sous pression (REP), les phénomènes de corrosion des parties métalliques sont à l’origine de la plupart des dégradations constatées. En addition des impacts directs sur les matériaux, des effets indirects interviennent, comme la libération de particules dans le fluide primaire, qui lors de leur passage dans le cœur du réacteur sont activées sous flux neutronique. Ces particules, appelées produits de corrosion, sont ensuite disséminées dans l’ensemble du circuit et participent à la contamination des centrales et à la dosimétrie des travailleurs. La baisse de la dosimétrie alors passe par la compréhension des mécanismes de contamination. L’objectif de cette thèse est l’obtention de nouvelles données expérimentales en milieu acide borique dans le cadre du développement de modèles décrivant le comportement des produits de corrosion dans le circuit primaire, et notamment sur le relâchement du nickel par des phénomènes de dissolution/précipitation. Le travail présenté dans ce mémoire s’est focalisé sur une des phases solides du nickel, l’oxyde de nickel (NiO), ainsi que sur le comportement en solution de sa forme ionique, Ni2+.
La solubilité de NiO a été mesurée à haute température à l’aide d’un réacteur à circulation spécialement conçu pour fonctionner à haute température et pression. Compte tenu des concentrations très faibles en Ni dans les conditions de nos essais (300°C, pH>7), une méthode d’analyse du nickel dissous à l’échelle de l’ultra-trace en milieu bore-lithium a été développée par ICP-MS et validée statistiquement par la méthode du profil d’exactitude. La solubilité de l’oxyde de nickel a ensuite été mesurée dans le cadre d’essais dits de «Benchmark». Les résultats de cette étude montrent une concentration en nickel plus élevée que prévue à cause d’un relâchement de particules de NiO à la sortie du réacteur. Cela a mis en lumière la grande difficulté de ces mesures, ainsi que des points d’amélioration nécessaires du dispositif expérimental pour pouvoir poursuivre les études entreprises.
La complexation du nickel par les (poly)borates a ensuite été étudiée. Une expérience a été conduite où les ions nickel sont progressivement formés par oxydation d’une électrode de nickel métallique dans une solution d’acide borique. Basé sur les résultats expérimentaux et sur la modélisation de la spéciation aqueuse du bore, l’évolution du pH a montré l’existence significative d’un complexe nickel-bore. Le complexe neutre NiB3O4(OH)3 a été mis en évidence pour de fortes concentrations en acide borique, lorsque les polyborates sont présents. Les constantes d’équilibres ont été calculées à 25, 50 et 70°C, ainsi que les données thermodynamiques associées. La structure du complexe n’ayant pu être déterminée expérimentalement, des calculs ab-intio complémentaires ont été entrepris afin de vérifier sa stabilité en milieu aqueux. Cette étude suggère également que le complexe peut significativement augmenter la solubilité des phases solides de nickel en fonction du pH et de la concentration en acide borique.
Enfin, les cinétiques de dissolution de l’oxyde de nickel ont été mesurées en milieu acide chlorhydrique et en milieu acide borique de 25 à 100°C et un pH de 6. Les résultats ont mis en évidence un effet inhibiteur de l’acide borique sur les vitesses de dissolution de NiO dont le phénomène est exacerbé par l’augmentation de la température et de la concentration en bore. La formation d’un complexe surfacique {Me-OB(OH)2} a été mise en avant pour expliquer cet effet. La constante de complexation Kb associée a été ajustée par modélisation 2pK monosite à couche diffuse afin de déterminer la spéciation de surface de NiO dans les conditions chimiques des essais et pouvoir ainsi modéliser les cinétiques de dissolution par une loi de type r=A0exp(-Ea/RT){Me-(OH)2+}²milieu H3BO3. Ce modèle suggère que l’effet inhibiteur est expliqué par la diminution des sites protonés à la surface de NiO. |
In the primary circuit of a pressurized water reactor (PWR), the main corrosion issue is linked to the formation of different oxides, called corrosion products. Some particles of these oxides are released in the primary fluid and may be activated when they pass through the core of the reactor. Even if the quantity of these particles is very low, the radiation dose rates can be strongly influenced by their deposition on the whole primary circuit. To control the contamination, the understanding of the corrosion products behavior chemistry is needed an in particular their transport by dissolution/precipitation. Nickel comes from steam generator tubing and is one of the major studied corrosion product because of its activation into 58cobalt. Precise knowledge of the solubility of nickel and how it changes with temperature and solution chemistry would be then valuable to understand its transport from steam generator tubes to the core. This work focuses on the nickel oxide phase (NiO) and the behavior in solution of its ionic form Ni2+.
The solubility of nickel oxide has been determined at high temperature and pressure by the use of a flow through cell reactor specially designed to perform measurements in the conditions of the primary circuit. Because the solubility of nickel is very low at 300°C and pH>7, a new method for the determination of ultra-traces nickel concentrations in lithium/boron medium by ICP-MS coupled with a desolvator system nebulizer has been developed and validated by the statistical approach of accuracy profiles. The solubility of nickel oxide has been measured at 300°C and basic pH in the context of Benchmark trials. The results showed higher concentrations of nickel than predicted because of particles releasing at the exit of the reaction cell. It highlights also the strong difficulty of these kind of measurements and an improvement of our experimental system is necessary before starting new trials.
The complexation of nickel by the (poly)borates has been also studied. An experiment has been performed in which nickel ions were gradually formed by oxidation of a nickel metal electrode in a solution of boric acid. Based on the experimental results and aqueous speciation modeling, the evolution of pH showed the existence of significant nickel-boron complexation. A neutral complex NiB3O4(OH)3 was postulated at high boric acid concentrations when polyborates are present, and the equilibrium constants were determined at 25, 50 and 70°C. The associated thermodynamics data have also been determined. First principles calculations were investigated and tend to show that the complex is thermodynamically stable. The results of this study suggest that complexation of nickel ions by borates can significantly enhance the solubility of nickel metal and nickel oxide depending on the concentration of boric acid and pH.
Dissolution rates of nickel oxide have been measured in hydrochloric acid and in boric acid media up to 100°C and pH 6. Results showed that boric acid inhibits the dissolution rates of NiO and this phenomenon is enhanced by the temperature and the concentration of boron. The formation of a surface complex {Me-OB(OH)2} was postulated to explain this effect. The associated surface complexation constant Kb has been determined by the use of a 2pK monosite with a diffuse layer model in order to determine the surface speciation of NiO in the chemical conditions of our trials. Then the experimental dissolution rates in boric acid medium were modeled with a kinetic equation r=A0exp(-Ea/RT){Me-(OH)2+}²H3BO3 medium. This model tends to show that the inhibitor effect is related to the concentration’s decrease of the protonated surface sites. |