Les biofilms représentent une contrainte technologique dans le secteur industriel et sont à l’origine de nombreux cas d’infections chroniques dans le domaine médical. De ce fait, la compréhension des processus biologiques qui s’opèrent au sein de ces communautés microbiennes est un défi permanent. Des méthodes spécifiques, sensibles et diversifiées s’avèrent essentielles pour apporter une connaissance approfondie de l’organisation des biofilms en réponse à des facteurs environnementaux. La matrice extracellulaire qui englobe les microorganismes constitue un réseau complexe, et la description de sa composition et de sa structure constitue un enjeu majeur. Des outils de caractérisation in situ et non-destructifs des Substances ExoPolymériques
ont pu être proposés lors de ce travail de thèse : des méthodes de quantification ciblant spécifiquement chaque composant majeur de la matrice extracellulaire ont ainsi été développées et validées sur des biofilms modèles. Ces biofilms, choisis pour leur diversité en terme de matrice
extracellulaire sont formés par les souches Pseudomonas aeruginosa ATCC 15442, Bacillus licheniformis CIP 110824 et Weissella confusa LBAE-UPS C39-2.
Des critères communs ont été retenus pour guider le choix des marqueurs retenus pour développer les dosages : spécificité pour la détection de toutes les formes moléculaires d’une même famille biochimique, sensibilité pour la détection de faibles quantités de polymères dans des biofilms en microplaque, et possibilité d’observation en microscopie basée sur la détection de fluorescence.
Une stratégie commune a été adoptée pour la quantification des exoprotéines (ePN), exopolysaccharides (ePS) et fibres amyloïdes (FA) de la matrice et a consisté à : définir une molécule standard pour calibrer le test ; analyser d’éventuelles interférences en solution;valider la faisabilité et la fiabilité du test in situ par la méthode des ajouts dosées réalisée sur chacun des biofilms modèles. Un composé naturel pro-fluorescent, l’épicocconone, a été retenu pour la quantification des exoprotéines. Le test a montré une limite de détection de 0,2 μg par puits, sans aucune interférence
significative des autres composants majeurs du biofilms (ePS, ADNe, cellules). D’autre part, les protéines sous forme amyloïdes ont pu être détectées avec la même sensibilité que les non amyloïdes par ce marqueur. Par la suite, les exopolysaccharides ont été dosés en exploitant la réaction de Schiff, et la méthode a permis d’obtenir une limite de détection de 0,3 μg par puits. Les protéines amyloïdes bactériennes (FA) ont également été quantifiées au moyen du marqueur Thioflavine T. La k-caséine a été utilisée comme étalon, après fibrillation de la protéine native in vitro.
Deux types de dosages ont été développés : le dosage ex situ de FA extraites de biofilms bactériens et le dosage in situ des protéines amyloïdes au coeur des biofilms. Enfin l’ADN extracellulaire (ADNe) a également été quantifié à partir du PicoGreen® tout en contrôlant le temps d’exposition du marqueur avec les biofilms afin de ne marquer que l’ADN extracellulaire. Un profil quantitatif des SEP a ainsi pu être établi pour les trois souches modèles.
Le second objectif du travail s’est focalisé sur la compréhension du rôle des SEP dans les propriétés d’adhérence et de cohésion du biofilm de Bacillus licheniformis, responsable de la colonisation de surfaces dans l’industrie papetière. Les outils ainsi développés ont permis d’étudier la contribution de chaque composé matriciel dans le comportement du biofilm, en réponse à des actions enzymatiques. La combinaison de ces dosages à des observations en microscopie confocale et à des mesures de perméabilité du biofilm a alors permis de proposer une interaction possible entre les fibres amyloïdes et l’ADN extracellulaire. Ce complexe stable pourrait agir comme facteur d’adhérence et d’agrégation intercellulaire pour assurer la stabilité et la structure tridimensionnelle du biofilm. |
Biofilms are detrimental in many industrial and medical areas and understanding of biofilms processes has been a challenge for decades. Specific, sensitive and rapid methods for monitoring biofilm formation are essential for a deep knowledge of biofilm organization and response to environmental factors. In such complex network that constitutes the biofilm matrix, it has become a major issue to succeed in describing its composition and local structure to determine the interactions that govern the biofilm formation.
Non-destructive and in situ methods for Exopolymeric Substances characterization were proposed along this PhD work. The first aim of the study was to propose some quantitative tools that would specifically target each major compound of the biofilm matrix. Some performance criteria were commonly established to guide the choice of each dye and to validate each step of the analytical development. These requirements can be displayed in terms of biochemical specificity, sensitivity and applicability on fluorescence-based microscopy. A common experimental strategy was carried out to quantify the exoproteins (ePN), exopolysaccharides (ePS) and amyloid fibrils and aimed at choosing a calibration standard; analyzing in vitro interferences;validating the practicability and the reliability of each proposed method for an in situ implementation on biofilms. This last criteria was verified by implementing the Standard Addition Method.
For that purpose, a first method was developed to take advantage of a natural pro-fluorescent dye, called epicocconone, to quantify the ePN of three model bacterial biofilms formed by the strains Bacillus licheniformis CIP 110824, Pseudomonas aeruginosa ATCC 15442 and Weissella confusa LBAEUPS C39.2. The three bacterial models were chosen because of their contrasted EPS matrix composition. This method showed a detection limit of about 0.2μg per well and no significant interference were revealed. Moreover the epicocconone assay was able to quantify the AF with the
same sensitivity as the other proteins. Subsequently, exopolysaccharides from the same strains were assayed by applying the Periodic acid-Schiff reaction in a microplate format. This chemical reaction targets the majority of the hydroxyl groups of carbohydrate and allows to give an exhaustive
estimation of the sugar content of the matrix with a detection limit of 0.3μg per well. Bacterial amyloids were also specifically quantified by the using of the benzothiazole dye Thioflavine T (ThT). An amyloidogenic protein, the κ-casein, was used as standard after an in vitro fibrillation of the native form. Two types of assay were performed with, firstly, an ex situ quantification of the extracted AF and secondly, an in situ assay directly implemented on intact biofilms. The eDNA was assayed by using the PicoGreen® and the dye exposure-time was monitored to ensure the specificity for the extracellular DNA. These tools led to establish a quantitative EPS profile of each model biofilm.
In a second part of the work, the study aimed at bringing some contribution to the understanding of the implication of the EPS in the adherence and cohesiveness properties of a Bacillus licheniformis biofilms, an agent of the paper industry surfaces colonization. The previously developed tools were useful to assess the level of contribution of each matrix component in the biofilm structural behavior in response to enzymatic actions. The combination of multiparametric analyses allowed to conclude about the possible interaction between functional amyloids and extracellular DNA as a strong complex that acts as an aggregative and adhesive factors to ensure biofilm stability and tridimensional structure. |