Soutenance de thèse de Ahmad ALBAAJ

Dynamiques individuelles et interactions entre santé mammaire, déséquilibres nutritionnels et l’établissement de la gestation chez la vache laitière


Titre anglais : Individual dynamics and interactions of udder health, nutritional disorders and conception establishment in dairy cows
Ecole Doctorale : SEVAB - Sciences Ecologiques, Vétérinaires, Agronomiques et Bioingenieries
Spécialité : Pathologie, Toxicologie, Génétique et Nutrition
Etablissement : Institut National Polytechnique de Toulouse
Unité de recherche : UMR 1225 - IHAP - Laboratoire Interactions Hôtes-Agents Pathogènes


Cette soutenance a eu lieu mardi 04 juillet 2017 à h00
Adresse de la soutenance : ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE DE TOULOUSE 23 Chemin des Capelles – BP 87614 – 31 076 Toulouse Cedex 3 - salle Salle Jaune

devant le jury composé de :
Gilles FOUCRAS   PR1   UMR1225 IHAP Interactions hôtes-agents pathogènes   Directeur de thèse
Catherine DISENHAUS   Professeur   UMR1348 PEGASE (INRA / Agrocampus ouest) Physiologie, Environnement et Génétique pour l'Animal et les Systèmes d'Elevage   Rapporteur
Karine MONFRAY   Professeur   Unité d'Epidémiologie des maladies animales et zoonotiques (EPIA) UMR 0346 de l’INRA-Theix   Rapporteur
Philippe  FAVERDIN   Directeur de recherche   UMR1348 PEGASE (INRA / Agrocampus ouest) Physiologie, Environnement et Génétique pour l'Animal et les Systèmes d'Elevage   Rapporteur
Didier RABOISSON   Maître de conférences   UMR1225 IHAP Interactions hôtes-agents pathogènes   CoDirecteur de thèse


Résumé de la thèse en français :  

La fertilité des vaches laitières s’est beaucoup dégradée au cours des dernières décennies, tant à l’échelle nationale qu’internationale. L’objectif poursuivi est d’apporter un éclairage épidémiologique sur les relations dynamiques entre la conception (réussite à l’insémination artificielle ; IA), les mammites subcliniques et les déséquilibres métabolico-nutritionnels que sont la cétose subclinique et les déséquilibres azotés de la ration.
Un premier chapitre bibliographique dresse l’état de l’art des liens entre performances de reproduction et (i) mammites, (ii) cétose subclinique et (iii) excès de protéines dégradables, en identifiant clairement les interactions et associations croisées entre ces différents composants.
Les trois parties suivantes mobilisent des données exhaustives du contrôle laitier français sur la période 2008-2012, qui ont été confrontées aux données d’insémination artificielle. La variable d’intérêt retenue est la conception à l’IA, soit pour la première IA ou toutes les IA. Les variations des comptages de cellules somatiques (CCS) ont été utilisées pour décrire la dynamique des mammites subcliniques autour de chaque IA, selon 4 classes (Bas-Bas, Bas-Haut, Haut-Bas et Haut-Haut) et pour différents seuils de CCS. Le statut de la cétose subclinique a été évalué via les taux butyreux et protéique du lait. Les concentrations d’urée du lait sont utilisées pour caractériser les déséquilibres azotés.
Le second chapitre propose alors une description succincte des résultats de production et de reproduction des troupeaux bovins laitiers français sur la période d’étude.
Le troisième chapitre focalise sur l’interaction entre les CCS et la cétose subclinique dans un modèle de régression de Poisson expliquant la conception. Les chances de conception à l’IA1 sont réduites de 14% (Risque relatif = 0.86 [IC 95%=0.85–0.87]) pour les groupes Bas-Haut et Haut-Haut, comparé au groupe Bas-Bas, et de 3 à 17 %, selon les définitions retenues, lors de cétose subclinique comparé à son absence. Les résultats identifient et quantifient clairement l’interaction entre la cétose subclinique et les mammites dans leur association avec la conception : la baisse de la conception est jusqu’à 2 fois supérieure en présence simultanée d’une augmentation des CCS et d’une cétose subclinique par rapport à la situation où il y a seulement l’augmentation des CCS.
Le quatrième chapitre, mobilisant des méthodes proches du précédent, montre que la baisse d’urée du lait autour de l’IA (en dessous de 150 mg/kg, 2.6 mmol/L) est associée à un risque de baisse de la conception de 5 à 9% (Risque relatif = 0.91 (IC95%=0.87–0.96)]) par rapport à des concentrations d’urée du lait qui restent stables (250 - 450 mg/kg ou 4.3 - 7.7 mmol/L). Ceci a permis d’identifier l’intérêt d’une stabilité de l’urée sur la réussite à l’IA, y compris pour des variations à la baisse, alors que seule la hausse d’urée était identifiée comme facteur de risque de dégradation des résultats de reproduction jusqu’alors.
Une partie finale permet de mettre en perspective ces éléments originaux. Une des principales limites de ces travaux est la définition de la cétose subclinique à partir des taux du lait, et les résultats actuels bénéficieraient d’une actualisation avec un indicateur plus précis de ce trouble. Ces résultats soutiennent qu’une inflammation locale peut affecter la réponse de l’ensemble de l’organisme et altérer les fonctions d'autres organes dans les semaines qui suivent. Ils illustrent la complexité et les interactions entre les différents troubles chez un même animal. D’autre part, maintenir des niveaux bas d’urée du lait est légèrement pénalisant pour la conception, et ne garantit pas les meilleurs résultats de reproduction.

 
Résumé de la thèse en anglais:  

Reproductive performances of dairy cows are recognized as a key parameter for profitability of farms, but they are getting worse continuously in many countries. Infectious and nutritional disorders are suspected as possible reasons of these changes. Mammary infection, nitrogen imbalance and metabolic disorders have been reported to be negatively associated with conception, but their interactions and dynamics are not fully understood. The objective of the present work is to better describe the relationship between fertility, udder health, subclinical ketosis (SCK) and nitrogen imbalance accounting for the temporal variations of these events and their interaction.
The first section reviews the link between fertility and (i) mastitis, (ii) metabolic disorders and (iii) nitrogen imbalance in dairy cows in order to clarify the complex interaction among these events.
The 3 other sections are based on exhaustive data from the national French dairy milk improvement system and data on the artificial inseminations (AI) from 2008 to 2012. Fertility was explained as conception at first (AI1) or at all AI. The udder health status were evaluated through the somatic cell counts (SCC). Several proxies based on the milk fat and protein contents were proposed to define SCK. Milk urea concentration is used to investigate the exposure of nitrogen imbalance.
The second section aims to describe the actual situation of milk production and reproduction in French dairy herds.
The third section focuses on the interaction between SCC and SCK and their association with conception. On average, the risk of conception at AI1 was 14% lower when the SCC increased or remained high within 40 days before and after AI (Relative risk [and 95% CI] = 0.86 [0.85–0.87]), compared to low SCC before and after AI. The reduction in conception success associated with SCK (fat and protein contents changes) varied from 3% to 17% depending on the used SCK proxy. Including the interaction term SCC*SCK clearly showed that the association of increased SCC around AI with conception success was modified by the presence of SCK. A cow that already has SCK and experiences an increase in SCC around or after AI exhibits up to 2 times further decrease in conception success compared with a cow with a high SCC and no SCK.
The fourth section, using similar methods as the previous one, shows that low milk urea levels after AI are negatively associated with conception. Cows with a low urea (< 150 mg/kg, 2.6 mM) after AI have a reduced conception (RR [and 95% CI] = 0.96 [0.94–0.99]) compared to cows with intermediate urea (250-450 mg/kg , 4.3 - 7.7 mM) after AI. Furthermore, cows exhibited a 5 to 9% decrease in conception (relative risk [and 95% CI] = 0.91 [0.87–0.96]) when urea levels decrease from intermediate before to low after AI, compared with always intermediate urea cows. This work revealed that a decrease in urea from intermediate (before AI) to low (after AI) is a risk factor for conception failure in addition to the previous known risk factor that is nitrogen excess.
The final section aims to highlights the perspective of these results. The definition of SCK used in this work was identified as the main limitation and the present results would benefit from an update with a better indicator of this disorder. The present work supports that a local inflammation may affect the entire body response and alters the functions of other organs like the reproductive tract. Furthermore, maintaining low urea levels does not provide any particular advantage and might be negatively associated with conception.

Mots clés en français :Santé,Epidémiologie,Production laitière,Mammite,Cétose,Urée
Mots clés en anglais :   Health,Epidemiology,Milk production,Mastitis,Ketosis,Urea