La gestion par éclusées des aménagements hydroélectriques (plus de 150 en France) pour la production d'énergie de pointe engendre de brusques variations de débit sur les cours d'eau et est susceptible d'altérer la composition, l'abondance et la structure des populations de poissons et d'invertébrés, sur de longues distances. Les objectifs de cette thèse ont été (1) de développer une méthode de caractérisation des éclusées au sein des hydrogrammes, ainsi qu'un indicateur synthétique du niveau de perturbation hydrologique, et (2) de progresser dans la définition des mesures de mitigation des impacts des éclusées sur les poissons. A partir de l'analyse de 97 stations et 1575 années de données de débit, les gradients des variations naturelles de débit ont tout d'abord été caractérisés sur 8 gammes entre 5% et 4 fois le débit moyen interannuel (module). Des formules représentant les variations de débit « les plus rapides possibles naturellement » ont été construites en tenant compte du type de variation (hausse ou baisse), de la taille du cours d'eau (via le module) et de la gamme de débit sur laquelle se déroule la variation, pour ensuite discriminer les éclusées des événements naturels. A partir de l'analyse de 80 stations et 491 années de données de débit influencées par les éclusées, une méthode a été mise au point pour repérer au sein des hydrogrammes les éclusées dont les caractéristiques sont au-delà de ce qui peut se rencontrer en hydrologie naturelle, à partir de 3 critères : une amplitude minimale (≥ à 10% du module et ≥ à 20% du débit de base de l'éclusées), un gradient minimal (> au gradient naturel maximal) et une limite haute sur le débit maximum (pour éliminer les événements de crues). Une grande variabilité des régimes d'éclusées du fait de la diversité des aménagements hydroélectriques et des fluctuations des apports hydrologiques et de la demande énergétique, a été constatée et illustrée. Un indicateur synthétique différenciant 5 niveaux de perturbation hydrologique induit par les régimes d'éclusées a été construit. Le niveau de perturbation de chacune des 491 années de données a été évalué par expertise par 3 opérateurs selon les connaissances sur les impacts biologiques des éclusées. Une analyse discriminante linéaire permet de reproduire ce classement à partir de 5 paramètres caractérisant les régimes d'éclusées (87% de bon reclassement). Les exemples montrent que l'indicateur est bien sensible aux changements de gestion des centrales et permet d'apprécier les évolutions spatio-temporelles des régimes d'éclusées, notamment leur amortissement vers l'aval. L'indicateur peut être produit par année ou par période correspondant à des phases biologiques. Son calcul automatisé ne nécessite que l'hydrogramme sur la période ciblée, la valeur du module du cours d'eau et les débits d'équipement des centrales en amont. Cet indicateur constitue un outil pour les gestionnaires de « pré-diagnostic » des impacts biologiques et de suivi des évolutions spatiales et temporelles des régimes d'éclusées. Une réflexion a été menée sur les études, méthodes et critères de définition des mesures de mitigation des impacts des éclusées, en s'appuyant sur une importante revue bibliographique et sur plusieurs études de cas (Dordogne, Maronne, Creuse, Gave d'Ossau, Lez, Doubs). Les travaux portent majoritairement sur la truite et le saumon atlantique, mais également sur l'ombre commun et les cyprinidés. Les mesures de mitigation possible et les types d'étude à mettre en œuvre ont été listés et discutés. Les différentes problématiques posées par la gestion par éclusées (fonctionnalité et exondation des frayères, échouage-piégeage et dérive des alevins, conditions d'habitats) ont été passées en revue afin d'extraire les résultats et les critères permettant de définir des mesures efficaces. |
Hydropeaking management of hydroelectric facilities (more than 150 in France) generates sudden changes in flow on the river and can affect the composition, the abundance and the structure of fish and invertebrates populations over long distances. The objectives of this thesis were (1) to develop a method for characterizing hydropeaks within hydrograph and a synthetic indicator of hydrological disturbance, and (2) to progress in defining mitigation measures of hydropeaking impacts on fish. From the analysis of 97 stations and 1575 years of flow data, rate of change of natural flow variations have been characterized within 8 ranges between 5% and 4 times the mean inter-annual discharge. Formulas representing the "fastest variations possible naturally" and taking into account the type of change (increase or decrease), the size of the stream (via the mean inter-annual discharge) and the flow range over which the variation takes place have been constructed and then used to discriminate hydropeaks and natural events. From the analysis of 80 stations and 491 years of flow data affected by hydropeaks, a method was developed to identify, within the hydrograph, hydropeaks whose characteristics are beyond what can occur in natural hydrology, using 3 criteria: a minimum range (≥ 10% of the mean inter-annual discharge and ≥ 20% of the hydropeak base flow), a minimal rate of change (> to the maximum natural rate of change) and an upper limit on the maximum flow rate (to remove flood events). A large variation in hydropeaking regimes, due to the diversity of hydroelectric schemes and fluctuations in incoming flow and energy demand, was observed and illustrated. A synthetic indicator differentiating 5 levels of hydrological disturbance induced by hydropeaking regimes was constructed. The level of disturbance of each of 491 years of flow data was evaluated by 3 expert operators according to knowledge of the biological impacts of hydropeaks. Linear discriminant analysis allows to reproduce this classification using 5 characteristic parameters of hydropeaking regimes (87% of correct reclassification). Examples show that the indicator is sensitive to changes in hydropower plant management and allows to appreciate the spatial and temporal changes in hydropeaking regimes, including the cushioning in downstream direction. The indicator can be produced per year or per period corresponding to biological phases. Its automated calculation requires only the hydrograph on the target period, the value of the mean inter-annual discharge and the maximum turbine discharge of the hydropower plant upstream. This indicator is a tool for managers of "pre-diagnosis" of biological impacts and for monitoring spatial and temporal changes in hydropeaking. Reflections were conducted on the studies, methods and criteria for defining mitigation measures of hydropeaking impacts, based on the literature and on several case studies (Dordogne, Maronne, Creuse, Gave d'Ossau, Lez, Doubs). Studies mainly concern trout and Atlantic salmon, but also grayling and cyprinids. Possible mitigation measures and types of studies to implement have been listed and discussed. The various issues raised by hydropeaking (functionality and dewatering of spawning grounds, stranding-trapping and drift of fry, conditions of habitat) have been reviewed in order to identify results and criteria to determine effective measures. |