Résume
Les zones côtières du Golfe de Guinée, essentielles sur le plan écologique et socio-économique pour les populations d’Afrique, sont particulièrement exposées aux menaces telles que les inondations, les submersions marines, l'érosion côtière et la subsidence. Ces problématiques sont accentuées par les activités humaines et le changement climatique, et notamment l'élévation du niveau de la mer. Par conséquent, il est crucial de comprendre et surveiller les variations du niveau marin côtier de cette région densément peuplée et vulnérable. Toutefois, ces objectifs sont complexes de par le nombre limité de stations de mesure in-situ dans le Golfe de Guinée. L'altimétrie satellitaire, avec plus de 30 ans de données sur les variations du niveau de la mer, offre une perspective à ce problème. Bien qu'initialement fiable uniquement à plus de 20-30 km des côtes en raison des interférences terrestres et difficultés de traitement, grâce à des progrès récents, cette technique commence à fournir des données précises sur le niveau de la mer à proximité immédiate des côtes, entre 0 et 20 km. Cette avancée nous a permis de développer et valider un réseau de "stations virtuelles" le long de la côte du Golfe de Guinée, générant des séries temporelles longues et continues des variations du niveau de la mer en accord général (corrélation > 0.5) avec celles des données des marégraphes disponibles. Nous en avons dérivé les constituants des ondes de marée principales. Comparés aux marégraphes, le signal de marée côtier dérivé de l’altimétrie est légèrement sous estimé, mais les différences ne dépassent pas 6.5 cm, représentant moins de 6 % du signal total. Nous avons montré que ce réseau de marégraphes virtuels est une alternative aux mesures in-situ où ces dernières ne sont pas disponibles. Nous nous sommes ensuite focalisé sur le cas de l’estuaire du Wouri en utilisant la complémentarité entre une station virtuelle altimétrique située juste au large de l’estuaire et le réseau de marégraphes situé à l’intérieur, Pour ce faire, une partie des données de ce dernier a été numérisée et validée. Nous avons analysé les processus dynamiques à l’origine des variations de hauteur de la mer observées. La marée est le facteur prédominant, contribuant à plus de 96 % des variations du niveau de la mer locale. L’étude de l’ensemble de données altimétrie-marégraphie met en évidence une amplification et un déplacement de la marée à mesure que l'on pénètre dans l'estuaire. Nous avons montré que d'autres facteurs que la marée, comme l'effet barométrique inverse, le débit des rivières et le signal saisonnier, bien qu’ayant une contribution moindre, influencent de manière significative les hauteurs maximales et minimales des eaux dans l’estuaire du Wouri. En outre, le signal des résidus sans marée présente une variabilité interannuelle et saisonnière marquée. Ce dernier est caractérisé par un cycle semi-annuel avec des maxima en octobre (pic majeur) et entre février et mars (secondaire). Nous avons ensuite étudié les évènements de hauteurs d'eau extrêmes dans l’estuaire du Wouri et leur possible rôle dans les inondations répertoriées à Douala. Les événements extrêmes suivent un cycle saisonnier prononcé, et ont principalement lieu en septembre et octobre, coïncidant avec la grande saison des pluies. Ils apparaissent modulés par le cycle saisonnier de hauteur de la mer qui amplifie ou atténue les hauteurs d'eau extrêmes observées selon la période de l’année. Nous avons étudié en détail deux événements exceptionnels, en d'Août 2020 et 2022. Le premier correspond à l’inondation la plus importante jamais enregistrée à Douala. Pour aller plus loin, il faudrait des données in-situ complémentaires et un modèle numérique local.
Mots clés : niveau de la mer, Golfe de Guinée, estuaire du Wouri, station altimétrique virtuelle, marégraphe, marée. |
The coastal zones of the Gulf of Guinea, which are ecologically and socio-economically essential for the populations of West Africa, are particularly exposed to threats such as flooding, marine submersion, coastal erosion, and subsidence. These issues are exacerbated by human activities and climate change, particularly sea-level rise. Therefore, it is crucial to understand and monitor the variations in coastal sea levels in this densely populated and vulnerable region. However, achieving these objectives is challenging due to the limited number of in-situ measurement stations in the Gulf of Guinea. Satellite altimetry, with over 30 years of data on sea level variations, provides a solution to this problem. Although initially reliable only beyond 20-30 km from the coast due to land interference and processing difficulties, recent advances have enabled this technique to provide accurate sea level data in close proximity to the coast, between 0 and 20 km. This progress has allowed us to develop and validate a network of "virtual stations" along the Gulf of Guinea coast, generating long and continuous time series of sea level variations that generally correlate (correlation > 0.5) with available tide gauge data. From these, we derived the constituents of the main tidal waves. Compared to tide gauges, the coastal tidal signal derived from altimetry is slightly underestimated, but the differences do not exceed 6.5 cm, representing less than 6% of the total signal. We have shown that this network of virtual tide gauges is an alternative to in-situ measurements where these are not available. We then focused on the case of the Wouri estuary using the complementarity between a virtual altimetric station located just offshore of the estuary and the network of tide gauges located inside. To do this, some of the data from the latter was digitized and validated. We analyzed the dynamic processes responsible for the observed sea level variations. The tide is the predominant factor, contributing more than 96% of the local sea level variations. The study of the combined altimetry-tide gauge dataset highlights an amplification and shift of the tide as one moves into the estuary. We have shown that other factors besides the tide, such as the inverse barometric effect, river discharge, and the seasonal signal, although having a lesser contribution, significantly influence the maximum and minimum water heights in the Wouri estuary. Additionally, the non-tidal residual signal exhibits marked interannual and seasonal variability. The latter is characterized by a semi-annual cycle with maxima in October (major peak) and between February and March (secondary). We then studied extreme water level events in the Wouri estuary and their possible role in the documented flooding in Douala. Extreme events follow a pronounced seasonal cycle, occurring mainly in September and October, coinciding with the major rainy season. They appear modulated by the seasonal sea level cycle, which amplifies or attenuates the observed extreme water levels depending on the time of year. We studied in detail two exceptional events in August 2020 and 2022. The first corresponds to the most significant flood ever recorded in Douala. To go further, additional in-situ data and a local numerical model would be required.
Keywords: sea level, Gulf of Guinea, Wouri estuary, virtual altimetric station, tide gauge, tide. |