Les mers d'Asie du Sud-Est, une série de bassins semi-fermés situés au carrefour entre les océans Pacifique et Indien, occupent une position unique dans la circulation océanique et atmosphérique globale. L'interaction d'un forçage atmosphérique intense avec les ondes internes particulièrement puissantes générées par la bathymétrie complexe de la région induit un mélange et une transformation significative des masses d'eau qui transitent entre les deux océans à travers les nombreux détroits de la région.
Cela module les propriétés de surface et affecte la structure verticale des masses d'eau dans les bassins voisins sur différentes échelles de temps, en interaction étroite avec divers phénomènes atmosphériques à différentes échelles, depuis la convection atmosphérique profonde jusqu'aux phénomènes climatiques tels que l'oscillation australe El Niño ou l'oscillation décennale du Pacifique. Comprendre et modéliser précisément le mélange océanique qui se produit dans cette région, et en particulier la physique du mélange induit par les ondes internes, est un enjeu important pour mieux représenter et étudier le climat actuel et futur.
Visant à représenter et résoudre la complexité des processus continus sur des grilles discrètes, les simulations numériques utilisées pour étudier l'océan ont une tendance fondamentale à générer des erreurs numériques qui doivent être contrôlées pour maintenir leur intégrité. Le mélange numérique entre couches de densités (isopcynes) différentes est particulièrement problématique. La physique du mélange dans cette direction est, bien que d'une importance majeure, assez subtile, encore mal comprise, et peut facilement être masquée et biaisée par l'accumulation d'erreurs numériques.
Dans les modèles numériques qui utilisent des niveaux verticaux fixes pour représenter la physique tridimensionnelle de l'océan, le transport à travers ces niveaux - et les erreurs associées à leur discrétisation - constitue la principale source de ce mélange parasite à travers les isopycnes.
Ce travail vise d'abord à illustrer et quantifier le fait que, dans la mesure où ces erreurs croissent avec la magnitude des vitesses, la résolution explicite dans un modèle des forts déplacements verticaux générés par les ondes internes entraînera des niveaux intenses de mélange parasite dans les mers d'Asie du Sud-Est si l'on ne prend pas soin de la manière dont l'advection verticale est traitée.
En utilisant le modèle numérique de dynamique océanique Symphonie, nous montrons que, bien que la représentation des ondes internes soit essentielle pour une simulation correcte des masses d'eau dans la région, les erreurs numériques générées par l'utilisation d'un schéma d'advection verticale trop diffusif peuvent biaiser sévèrement les résultats, et provoquer notamment une érosion indésirable des profils de salinité.
Nous comparons ensuite dans un cadre théorique les propriétés de différents schémas d'advection verticale et leur capacité à maintenir de faibles niveaux de mélange numérique lorsqu'ils sont utilisés pour transporter les champs de température et de salinité dans des conditions imitant les mouvements périodiques et quasi permanents des ondes internes dans un modèle numérique.
Enfin, reconnaissant que la réduction du mélange numérique ne peut être correctement atteinte sans prendre en compte les propriétés de l'algorithme d'intégration temporelle, nous proposons une nouvelle manière de concevoir ces schémas, visant à contrer ce mélange parasite.
Globalement, ce travail propose donc une étude approfondie de la manière dont l'advection verticale est traitée dans un modèle à coordonnées fixes et suggère des moyens d'améliorer cette représentation. |
The Southeast Asian Seas, a series of semi-enclosed basins at the crossroad between the Pacific and Indian Oceans, occupy a unique position in global oceanic and atmospheric circulation.
The interaction of atmospheric forcing with internal tides generated on the complex bathymetry of the region, which are among the strongest in the world, induces a substantial transformation of water masses moving from the Pacific to the Indian Ocean through the narrow straits and passages of the region.
This modulates the sea surface properties and affects the vertical structure of the neighbouring basins on different time scales, in close coupling with various atmospheric phenomena at all scales, from local atmospheric deep convection to climatic phenomena such as El Niño Southern Oscillation or the Pacific Decadal Oscillation.
Accurately understanding and modeling the mixing that occurs in the region, and in particular the physics of internal tide driven mixing, is an important matter to better represent current and future climate.
Because they attempt to represent the complexity of continuous processes on discrete grids, computer simulations used to study the ocean have a fundamental tendency to generate numerical inaccuracies that must be controlled in order for the output to be realistic.
Among these, spurious numerical mixing between layers of different densities is particularly troublesome. Indeed, physical mixing in this direction, though of major importance, is quite subtle, still poorly understood, and can easily be overwhelmed by numerical errors.
In numerical models that use fixed levels to represent the vertical physics of the ocean, transport across these levels - and errors associated with their discretization - is the main source of such spurious cross-isopycnal mixing.
This work focuses first on showing that since these errors scale with velocities, explicitly resolving the strong vertical displacements generated by internal tides propagating in the interior of the ocean will lead to intense levels of such spurious mixing in the Southeast Asian Seas if care is not taken in how vertical advection is implemented. Using the Symphonie ocean model, we show that while internal tides are essential for a correct representation of the water masses in the region, numerical errors generated by using an overly diffusive vertical advection scheme can severely bias the output. We then theoretically compare the properties of different schemes and their ability to maintain low levels of numerical mixing when used to transport temperature and salinity fields under conditions that mimic the periodic, quasi-permanent motions of internal tides in a numerical model. Finally, recognizing that the reduction of numerical mixing cannot be properly achieved without taking into account the properties of the time-stepping algorithm, we propose a new way to design advection schemes aimed at counteracting its spurious effect. Overall, this work proposes a deep look into the way vertical advection is handled in the fixed coordinate model and suggests ways to improve it. |