Soutenance de thèse de Céline CONDACHOU

Evaluation et suivi de la biodiversité Amazonienne par ADN environnemental


Titre anglais : Evaluation and monitoring of Amazonian biodiversity using environmental DNA
Ecole Doctorale : SEVAB - Sciences Ecologiques, Vétérinaires, Agronomiques et Bioingenieries
Spécialité : Ecologie, biodiversité et évolution
Etablissement : Université de Toulouse
Unité de recherche : UMR 5300 - CRBE - Centre de Recherche sur la Biodiversité et l'Environnement
Direction de thèse : Jérôme MURIENNE- Sébastien BROSSE


Cette soutenance aura lieu vendredi 19 septembre 2025 à 14h00
Adresse de la soutenance : 140 All. Théodore Despeyrous, 31400 Toulouse - salle Amphithéâtre Maxwell

devant le jury composé de :
Jérôme MURIENNE   Chargé de recherche   CNRS Occitanie Ouest   Directeur de thèse
Eric COISSAC   Professeur des universités   Université Grenoble Alpes   Rapporteur
Fabien LEPRIEUR   Professeur des universités   Université de Montpellier   Rapporteur
Sébastien BROSSE   Professeur des universités   Université de Toulouse   CoDirecteur de thèse
Florian ALTERMATT   Professeur   Universität Zürich   Examinateur
Quentin MAUVISSEAU   Docteur   Universitetet i Oslo   Examinateur
Virginie MARQUES   Docteure   ETH Zürich   Examinateur
Lisa JACQUIN   Professeure des universités   Université de Toulouse   Examinateur


Résumé de la thèse en français :  

Au cours des dernières décennies, des avancées technologiques majeures ont transformé notre façon d’évaluer la biodiversité. Des méthodes innovantes comme l’ADN environnemental (ADNe) permettent désormais de réaliser des inventaires non invasifs à grande échelle. Face à l’érosion accélérée de la biodiversité, ces outils sont devenus essentiels pour établir des programmes de suivi robustes. Dans ce contexte, l’ADNe suscite un intérêt croissant pour le suivi de la biodiversité aquatique. Toutefois, des incertitudes persistent concernant la fiabilité des mesures quantitatives et l’interprétation des signaux spatiaux et temporels associés. Cette thèse vise à répondre à ces enjeux en appliquant l’ADNe au suivi de la biodiversité dans les écosystèmes d’eau douce tropicaux, avec un focus sur la Guyane française.
Le premier chapitre de cette thèse compare le métabarcoding et la PCR digitale (dPCR) pour évaluer leur efficacité à détecter et quantifier des espèces de poissons. Cette étude constitue la première application de la dPCR en Guyane française, utilisant des espèces menacées du genre Harttiella comme modèle. Les deux approches ont donné des résultats de détection congruents, soulignant leur complémentarité pour le suivi des espèces. Par la suite, nous avons généré des ressources génomiques et développé des amorces spécifiques pour trois poissons d’eau douce exploités en Guyane : Tometes trilobatus, Myloplus rhomboidalis et Hoplias aimara. Sur cette base, nous avons étudié la relation entre les informations semi-quantitatives issues du métabarcoding (nombre de reads et nombre de réplicats de PCR positifs) et les concentrations absolues d’ADNe mesurées par dPCR pour T. trilobatus et M. rhomboidalis. Les résultats ont montré des différences selon les espèces et suggèrent que le nombre de réplicats de PCR peut fournir une estimation approximative de la concentration d’ADNe, même si son usage pour une quantification précise reste limité.
Le deuxième chapitre explore la dynamique spatiale de l’ADNe dans de petits cours d’eau. Nous avons pris comme modèle H. lucifer, une espèce de poisson dont l’habitat est limité aux zones de courant rapide, en tête de bassin. Des échantillons ont été prélevés à différentes distances de la population, et le signal d’ADNe a été quantifié via dPCR. Nos résultats montrent que la probabilité de détection diminue avec la distance, confirmant une portée de détection relativement courte (50–100 m).
Le troisième chapitre étudie la dynamique temporelle de l’ADNe, en se concentrant sur les variations saisonnières. Vingt sites ont été échantillonnés le long du fleuve Oyapock pendant la saison sèche et la saison des pluies, afin d’analyser l’impact des variations saisonnières sur les communautés de poissons, mammifères et amphibiens. Nos résultats montrent une augmentation de la détection des espèces terrestres pendant la saison des pluies. Ce phénomène illustre le processus de « lessivage » de l’ADNe, correspondant au transport de l’ADN depuis le milieu terrestre vers les rivières via les eaux de pluie. Par ailleurs, l’augmentation du débit, combinée à une baisse de la température durant la saison des pluies, réduit la dégradation de l’ADN et favorise son transport, offrant ainsi une vision plus régionale de la biodiversité. À l’inverse, la saison sèche limite la détection des espèces terrestres, mais restitue une image plus locale de la biodiversité. À notre connaissance, cette étude est la première à démontrer un effet saisonnier aussi marqué sur les estimations de biodiversité par ADNe dans les rivières tropicales, soulignant l’importance cruciale de prendre en compte les paramètres environnementaux lors de l’interprétation des données d’ADNe.
Dans l’ensemble, cette thèse contribue à l’amélioration des méthodes d’ADNe en abordant des défis majeurs actuels, tout en proposant des outils directement applicables à la gestion et à la conservation de la biodiversité en milieu tropical.

 
Résumé de la thèse en anglais:  

Over the past decades, significant technological advances have transformed biodiversity assessment. Remote sensing, acoustic monitoring, and molecular tools such as environmental DNA (eDNA) now offer large-scale and non-invasive methods for species detection. In the face of accelerating biodiversity loss and ecosystem degradation, such tools are needed to support robust, long-term monitoring efforts. In this context, eDNA has gained considerable attention as a promising method for aquatic biodiversity monitoring. Yet major questions remain regarding the reliability of its quantitative data and the interpretation of its spatial and temporal signals. This thesis aims to address these challenges by using eDNA for biodiversity monitoring in tropical freshwater ecosystems, with a focus on French Guiana.
The first chapter compares multi-species metabarcoding and species-specific digital PCR (dPCR) to evaluate their capacity to detect and quantify fish species. The first study presents the first field application of targeted dPCR in French Guiana, using threatened species of the genus Harttiella as a case study. Detection results were consistent between targeted and multi-species approaches, highlighting their complementarity. We then developed genomic resources and species-specific primers for three exploited freshwater fish species of French Guiana (Tometes trilobatus, Myloplus rhomboidalis, and Hoplias aimara). Building on this, we assessed the relationship between semi-quantitative metrics from metabarcoding (read counts and number of positive PCR replicates) and absolute eDNA concentrations measured by dPCR for T. trilobatus and M. rhomboidalis. The results revealed species-specific patterns and suggest that PCR replicates can provide a rough estimate of eDNA abundance, but their use for quantification remains limited.
The second chapter investigates the spatial dynamics of eDNA in streams of French Guiana. Using H. lucifer, a fish restricted to fast-flowing upstream habitats, as a model, we sampled eDNA at increasing distances from its population. Applying species-specific dPCR assays, developed based on a comprehensive phylogeny of all Harttiella species, we quantified the spatial decay of eDNA detection probability. Our results confirm a relatively short detection distance (50–100 m), consistent with prior studies.
The third chapter explores the temporal dynamics of eDNA in tropical freshwater ecosystems, focusing on seasonal variation. We sampled twenty sites along the Oyapock River during both the rainy and dry seasons and investigated the impact of seasonal changes on the ecological patterns of fish, mammals, and amphibian communities. Our results revealed pronounced seasonal differences linked to species’ water affinity: more low water affinity species were detected during the rainy season. This result illustrates the “eDNA washout” process, referring to the eDNA transport from land to rivers through rainwater. Additionally, increased water discharge combined with lower temperature during the rainy season reduces eDNA degradation and enhances transport, providing a broader spatial picture of biodiversity. In contrast, the dry season limits the detection of terrestrial species, but provides a more site-specific picture of biodiversity. This study is the first to demonstrate such drastic seasonal effects on eDNA-based biodiversity assessments in tropical rivers, emphasising the critical need to account for environmental factors when interpreting eDNA data.
Overall, this research contributes to the continuous refinement of eDNA methodologies by addressing current key challenges in eDNA research, while offering direct applied tools for biodiversity management and conservation in tropical environments.

Mots clés en français :Biodiversité, Neotropiques, Génomique Environnementale,
Mots clés en anglais :   Neotropics, Biodiversity, Environmental genomics,