L'irrigation joue un rôle crucial dans le système agricole mondial car elle d'améliorer les rendements et de sécuriser l'accès à l'alimentation à une population en constante croissance. Il est bien établi que l'irrigation a modifié les régimes hydrologiques de certaines régions, par contre son impact sur l'atmosphère est moins bien connu. Ce travail de thèse étudie les interactions entre les surfaces irriguées, la couche limite atmosphérique et les vents de méso-échelle dans le bassin semi-aride de l'Ebre, et en particulier dans la région d'Urgell à l'est de Lleida. Les travaux de recherches présentés ici utilisent le modèle couplé surface--atmosphère SURFEX--Meso-NH et des données d'observation obtenues lors de la campagne internationale LIAISE ayant eu lieu à l'été 2021. Il est d'abord montré comment l'irrigation doit être paramétrisée dans SURFEX pour représenter au mieux les flux de chaleur entre la surface et l'atmosphère. Cette paramétrisation, implémentée dans SURFEX, permet d'explorer les effets de l'irrigation sur l'atmosphère. Le premier résultat montre que l'irrigation permet de réduire la température de l'air à 2~m de l'ordre de 5°C et d'augmenter l'humidité spécifique de 50% pour des journées ensoleillées d'été. L'effet de l'irrigation en surface impacte l'atmosphère également plus haut, en stabilisant la couche limite atmosphérique et en diminuant sa hauteur. De plus, la forte hétérogéneité de surface présente dans la région d'étude entre zones irriguée et non-irriguée induit une circulation de brise de la zone irriguée vers la zone sèche. En plus de l'irrigation, le vent régional nommé Marinada se révèle être un facteur majeur dans la météorologie de la région d'Urgell. C'est pourquoi l'origine de ce vent ainsi que les processus qui y sont liés sont étudiés dans la présente thèse. Il est montré que la Marinada est un vent gravitaire provenant de l'écoulement d'une masse d'air maritime fraîche dans l'air chaud du bassin de l'Ebre depuis la cordillère prélittorale catalane. Cette masse d'air est amenée au-dessus de la cordillère catalane par l'action d'une brise de mer en première partie de journée. En seconde partie de journée, lorsque la Marinada commence à souffler, l'irrigation commence à l'influencer, notamment en retardant son arrivée ainsi qu'en atténuant son intensité. Les effets de l'irrigation sont enfin caractérisés et analysés plus globalement, sur les deux semaines de la période spéciale d'observation de LIAISE. Ces effets cumulés permettent d'évaluer la rétroaction de l'atmosphère influencée par l'irrigation sur l'évapotranspiration des cultures. Il est notamment démontré que les conditions atmosphériques plus fraîches, plus humides et moins venteuses provoquées par l'irrigation influencent l'évapotranspiration de la végétation. En particulier, ignorer cette rétroaction atmosphérique, comme c'est souvent le cas dans les modélisations de surface continentale non-couplées utilisées en hydrologie et agronomie, conduit à une surestimation de l'évapotranspiration des cultures irriguées. Cette surestimation est quantifiée à environ 20 à 40% sur les zones irriguées dans le contexte de LIAISE.
Cette thèse révèle le rôle prépondérant de l'irrigation sur la météorologie du bassin de l'Ebre pendant l'été. Les résultats montrent également que les modèles couplés surface--atmosphère ne devraient plus négliger ce facteur dans les régions semi-arides, et une paramétrisation pragmatique de l'irrigation, dans cette optique, est proposée. Au-delà d'une meilleure compréhension de l'influence de l'irrigation sur l'atmosphère, et de son importance en modélisation atmosphérique, ce travail contribue également à mieux comprendre son impact sur le cycle de l'eau à travers sa composante évapotranspirative, et plus largement sur l'impact de l'anthropisation et la soutenabilité de nos activités humaines. |
Irrigation plays a critical role in the global agricultural system, helping to improve yields and ensure access to food for an ever-growing population. It is well established that irrigation has altered the hydrological regimes of some regions. However, the effects of irrigation on the atmosphere are less well understood. This thesis investigates the interactions between irrigated areas, surface fluxes, the atmospheric boundary layer and mesoscale winds in the semi-arid Ebro basin, and in particular in the Urgell region east of Lleida. To this end, the research presented here uses the coupled surface-atmosphere model SURFEX--Meso-NH and observational data from the international LIAISE campaign carried out in summer 2021. It is first shown how irrigation must be parameterized in SURFEX to best represent the heat fluxes between the surface and the atmosphere. First, it is shown that irrigation reduces the air temperature at 2~m by about 5°C and increases the specific humidity by 50% over irrigated fields on sunny summer days. The effect of surface irrigation also affects the atmosphere higher up, stabilizing the atmospheric boundary layer and reducing its height. In addition, the strong surface heterogeneity present in the study area between irrigated and non-irrigated zones induces breeze circulations from irrigated zones to dry zones. In addition to irrigation, the regional wind known as the Marinada is an important factor in the meteorology of the Urgell region. Therefore, the origin of this wind and the processes related to it are studied in this thesis. It is shown that the Marinada is a fall wind that originates from the drainage of a fresh maritime air mass from the Catalan Pre-Coastal Range into the warm air of the Ebre basin. This air mass is carried over the Catalan Pre-Coastal Range by the action of a sea breeze during the first part of the day. In the second half of the day, when the Marinada begins to blow, irrigation begins to influence it. The irrigation delays the arrival of the Marinada and slows down the wind within it. The effects of irrigation are next characterized and analyzed more globally, over the two weeks of the special LIAISE observation period. Finally, these cumulative effects make it possible to assess the feedback of the atmosphere influenced by irrigation on crop evapotranspiration. In particular, it is shown that the cooler, wetter and less windy atmospheric conditions caused by irrigation influence vegetation evapotranspiration. In particular, ignoring this atmospheric feedback, as is often the case in offline land surface modelling used in hydrology and agronomy, leads to an overestimation of the evapotranspiration of irrigated crops. This overestimation is quantified to be about 20 to 40% over irrigated areas in the LIAISE context.
This thesis work reveals the dominant role of irrigation on the meteorology of the Ebro basin during the summer. The results also show that coupled surface-atmosphere models should no longer neglect this factor in semi-arid regions, leading to the proposal of a pragmatic parameterization of irrigation in this sense. Beyond a better understanding of the influence of irrigation on the atmosphere and its importance in atmospheric modelling, this work also provides information on the impact on the hydrological cycle through its evapotranspiration component and, more broadly, on the impact of anthropization and the sustainability of human activities. |