| Les champignons microscopiques produisent des métabolites toxiques appelés mycotoxines. Dans le contexte du changement climatique, les conditions de croissance de ces champignons et les métabolites qu'ils produisent évoluent, entraînant la production de nouvelles mycotoxines, dites "émergentes". Fusarium verticillioides, un pathogène majeur des cultures de céréales, produit des mycotoxines telles que les fumonisines ou les fusarines, ainsi que des mycotoxines émergentes comme la beauvéricine, la moniliformine ou encore la fusaproliférine. Ces mycotoxines émergentes échappent souvent aux détections conventionnelles, contribuant à la toxicité globale des produits agricoles contaminés. Les Poaceae (céréales), essentielles à la nutrition mondiale, sont des hôtes naturels de Fusarium verticillioides. Cependant, les contaminations par ce champignon sont exacerbées par des conditions climatiques défavorables ainsi que par des pratiques de culture, de manutention et de stockage inadéquates, entraînant des pertes économiques et des risques sanitaires substantiels. Ces problèmes sont particulièrement aigus en Afrique de l'Ouest, où le contrôle de la qualité fait souvent défaut et où les données sur les mycotoxines sont rares.
Dans ce contexte, le premier volet de notre travail a consisté en une mission d’échantillonnage au Bénin pour produire des données et évaluer l’état de contamination par le genre Fusarium des échantillons de maïs, de sorgho et de millet, et pour quantifier les concentrations totales de fumonisines dans des échantillons de maïs provenant de quatre marchés béninois. L’objectif préliminaire de cette mission était de caractériser et quantifier la contamination par les mycotoxines afin de mieux comprendre l’ampleur du problème.
 Nous avons ensuite exploré l'impact des conditions de culture sur la production de mycotoxines par F. verticillioides en appliquant l'approche OSMAC (One Strain Many Compounds), combinée à des analyses métabolomiques, ciblées et non ciblées, par LC-spectrométrie de masse en tandem. Nous avons fait varier les paramètres d’incubation ainsi que le type de milieu de culture (milieu liquide ou solide). Nous avons également utilisé différents milieux, à la fois des milieux de culture fongique standard et des milieux à base de farines de divers Poaceae (maïs, mil, sorgho ou riz).
 Les résultats montrent une production accrue de fumonisines sur le milieu à base de farine de maïs, avec un pic de production à 14 jours d’incubation. Cette observation nous a poussé à comparer le métabolome de Fusarium verticillioides sur les milieux à base de de maïs, de sorgho, de mil et de riz. Nous avons identifié plusieurs dérivés des fumonisines dans les échantillons cultivés sur milieu à base de farine de maïs, y compris des molécules potentiellement nouvelles et toxiques.
 Dans nos conditions expérimentales, les fumonisines et les fusarines étaient principalement retrouvées dans les milieux à base de maïs et de riz, tandis que les milieux à base de sorgho et de millet ne semblaient pas favoriser la production de ces molécules.
 Enfin, nous avons exploré le potentiel mycotoxinogène de Fusarium verticillioides en ajoutant des modificateurs épigénétiques dans le milieu de culture liquide. Cette approche a révélé l’effet inducteur du valproate de sodium, un inhibiteur des histone désacétylases, sur la biosynthèse de certains métabolites fongiques via l’induction de gènes silencieux ou faiblement exprimés. Ces résultats, obtenus par approche métabolomique, nous ont aidés à mieux comprendre la dynamique de production de mycotoxines par Fusarium verticillioides, dans le but d’améliorer la sécurité alimentaire et de réduire les risques pour la santé publique, en particulier dans les régions les plus vulnérables du monde.
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                | Microscopic fungi produce toxic metabolites known as mycotoxins. With climate change, growth conditions for these fungi and the metabolites they produce evolve, leading to the emergence of new mycotoxins. Fusarium verticillioides, a major pathogen of cereal crops, produces mycotoxins such as fumonisins and fusarins, as well as “emerging mycotoxins” like beauvericin, moniliformin, and fusaproliferin. These emerging mycotoxins often escape conventional detection, contributing to the overall toxicity of contaminated agricultural products. The Poaceae family (cereals), essential to global nutrition, are natural hosts for Fusarium verticillioides. However, contamination by this fungus is exacerbated by unfavorable climatic conditions and inadequate cultivation, handling, and storage practices, leading to significant economic losses and substantial health risks. These issues are particularly severe in West Africa, where quality control is often lacking and data on mycotoxins are scarce.
The first phase of our study involved a sampling mission in Benin to produce data and evaluate Fusarium contamination in maize, sorghum, and millet samples. We quantified the total fumonisin concentrations in maize samples from four Beninese markets, aiming to characterize and quantify the mycotoxin contamination to better understand the extent of the problem.
 We then explored the impact of cultivation conditions on the production of mycotoxins by F. verticillioides using the OSMAC (One Strain Many Compounds) approach, combined with targeted and untargeted metabolomic analyses via LC-MS/MS. We varied incubation parameters and culture media types, including both standard fungal culture media and media based on flours from various Poaceae (maize, millet, sorghum, or rice).
 Our results showed an increased production of fumonisins on maize flour-based media, peaking at 14 days of incubation. This observation led us to compare the metabolome of F. verticillioides on media based on maize, sorghum, millet, and rice. We identified several fumonisin derivatives in samples grown on maize flour-based media, including potentially new and toxic molecules. In our experimental conditions, fumonisins and fusarins were primarily found in maize and rice-based media, while sorghum and millet-based media did not favor the production of these molecules.
 Finally, we explored the mycotoxigenic potential of Fusarium verticillioides by adding epigenetic modifiers to the liquid culture medium. This approach revealed the inducing effect of sodium valproate, a histone deacetylase inhibitor, on the biosynthesis of certain fungal metabolites through the induction of silent or weakly expressed genes. These results, obtained through a metabolomic approach, helped us better understand the dynamics of mycotoxin production by Fusarium verticillioides, aiming to improve food safety and reduce public health risks, especially in the world's most vulnerable regions.
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