Un propulseur de Hall est un dispositif de propulsion électrique pour les engins spatiaux dans lequel des ions sont accélérés pour générer une poussée. L’accélération des ions est provoquée par l’application d’une différence de potentiel électrique entre une anode, située au fond d’un canal annulaire dans lequel le plasma est généré, et une cathode, placée à l’extérieur du canal. La cathode fournit aussi les électrons nécessaires à l’ignition du plasma duquel seront extraits les ions. Ces électrons remontent le champ électrique en direction de l’anode. Sur leur chemin ils sont piégés par un champ magnétique radial, ce qui augmente considérablement leur temps de résidence dans le canal et donc leur probabilité d'effectuer une collision ionisante.
Bien que nommé PPS pour propulseur à plasma stationnaire, la décharge est loin d’être figée dans le temps. Avec une décharge plasma sujette à de nombreuses oscillations plus ou moins irrégulières couvrant une large gamme de fréquence, allant de quelques Hz à plusieurs GHz et pouvant se propager dans des directions différentes, la dynamique est riche et complexe. Si certaines de ces oscillations peuvent être bénéfiques pour les performances du propulseur, elles peuvent aussi être délétères. Il est donc nécessaire de comprendre leur dynamique afin de pouvoir les contrôler.
Les travaux présentés dans cette thèse se concentrent sur les instabilités basses fréquences, inférieures au MHz. L’étude du plasma nous a permis d’identifier différents régimes d’oscillations dans lesquels une analyse temps-fréquence a révélé la coexistence et l'interdépendance d'instabilités distinctes. Citons par exemple le breathing mode (BM), une instabilité d’ionisation axiale de grande amplitude oscillant à quelques kHz, ou les oscillations de temps de transit ionique (ITTO), qui évoluent autour de la centaine de kHz. On trouve aussi la trace d’oscillations à faible amplitude dont les fréquences peuvent s’étendre jusqu’à quelques MHz. Il a été observé que dans certains régimes d’oscillation du plasma, ces oscillations apparaissaient en cascade les unes avec les autres, c’est-à-dire que chaque oscillation de fréquence supérieure a besoin de conditions particulières pour se développer, conditions qui étaient périodiquement créées par les oscillations ayant une fréquence inférieure. Les résultats suggèrent également qu’une possible interaction entre le BM et les oscillations à plus haute fréquence conduit à des ITTO, car il a été montré qu'une transition se produisait lorsque la fréquence de l'une des harmoniques du BM devenait un multiple de la fréquence des ITTO. Ce phénomène s'accompagne également d'une déformation des fonctions de distribution de l'énergie des ions.
L’irrégularité des oscillations pose également le défi du suivi temporel des fonctions de distribution en énergie des ions. Pour surmonter cette difficulté, une technique basée sur la détection d'événements similaires a été développée. Des évolutions de l’énergie des ions ont ainsi été mises en évidence sur deux échelles temporelles distinctes : d'une part, une réduction de l’accélération des ions à la fréquence des oscillations de BM et d'autre part, une oscillation de l'énergie des ions associée aux ITTO.
Il a été observé que ces modifications de l’énergie des ions, ainsi que l’apparition d’oscillations à la fréquence des ITTO sur le courant de décharge, coïncident avec la réception d’un pic de signal capacitif. Ce signal traduit la modification de la répartition du champ électrique au sein de la décharge. Il a aussi été montré, pour la première fois par imagerie rapide, que la luminosité axiale de la plume (plasma en dehors du canal) était modulée à la fréquence des ITTO.
Dans la direction azimutale, ont aussi été observées des fluctuations de la luminosité et de la distribution du courant de décharge, mettant en évidence l'existence de structures cohérentes, appelées rotating spokes, capables de se propager à la fois dans le sens E×B et -E×B. |
A Hall thruster is an electrical propulsion device for spacecraft in which ions are accelerated to generate thrust. The ions are accelerated by applying an electrical potential difference between an anode, located at the bottom of an annular channel in which the plasma is generated, and a cathode, located outside the channel. The cathode also supplies the electrons needed to ignite the plasma from which the ions will be extracted. These electrons travel up the electric field towards the anode, but during their travel they are trapped by a radial magnetic field, which considerably increases their residence time in the channel and therefore their probability of having an ionising collision.
Although called SPT for stationary plasma thruster, the discharge is far from fixed in time. With a plasma discharge subject to numerous relatively irregular oscillations covering a wide range of frequencies, from a few Hz to several GHz, and able to propagate in different directions, the plasma dynamic is rich and complex. While some of these oscillations can be beneficial for thruster performance, they can also be deleterious. It is therefore necessary to understand their dynamics in order to be able to control them.
The work presented in this thesis focuses on low-frequency instabilities, below MHz. The study of plasma has enabled us to identify different oscillation regimes in which a time-frequency analysis has revealed the coexistence and interdependence of distinct instabilities. Examples include the breathing mode (BM), a large-amplitude axial ionisation instability oscillating at a few kHz, and the ion transit time oscillations (ITTO), which evolve at around 100 kHz. There are also traces of low-amplitude oscillations with frequencies of up to a few MHz. It has been observed that in certain plasma oscillation regimes, these oscillations appear in cascade with each other, i.e. each higher-frequency oscillation needs particular conditions to develop, conditions that are periodically created by oscillations with a lower frequency. We also suspect a possible interaction between the BM and the higher-frequency oscillations that lead to ITTOs, as it has been shown that a transition occurs when the frequency of one of the BM harmonics becomes a multiple of the ITTO frequency. This phenomenon is also accompanied by a deformation of the ion energy distribution functions.
The irregularity of the oscillations also poses the challenge of tracking the ion energy distribution functions over time. To overcome this difficulty, a technique based on the detection of similar events has been developed. Changes in ion energy were detected on two distinct timescales: on the one hand, a reduced ion acceleration at BM frequency oscillations and, on the other, an oscillation in ion energy associated with ITTOs.
It was observed that these changes in ion energy, as well as the appearance of oscillations in the discharge current at the frequency of the ITTOs, coincide with the reception of a capacitive signal peak. This signal reflects the change in the distribution of the electric field within the discharge. It was also shown, for the first time using fast imaging, that the axial luminosity of the plume (plasma outside the channel) was modulated at the ITTO frequency.
In the azimuthal direction, fluctuations in the luminosity and distribution of the discharge current were also observed, highlighting the existence of coherent structures, called rotating spokes, capable of propagating in both the E×B and -E×B directions. |