La thèse vise à identifier les dispositifs d’action collective par lesquels l’agroécologie pourrait générer de nouveaux leviers de création et de captation de la valeur pour les éleveurs, favorisant une transition sectorielle. Pour y répondre, cette thèse met en exergue le rôle de trois registres de règles (cognitif, normatif et réglementaire), à différentes échelles, dans la reconfiguration du système d’acteurs et de ressources, qui serait favorable aux éleveurs en termes de valeur ajoutée créée et captée. Je propose ainsi le concept de compromis sociotechnique institutionnalisé. Ce concept permet de rendre compte que les processus de transition sociotechnique impliquent des processus de valorisation et d’appropriation sous-tendus par des rapports de forces entre acteurs. Pour y parvenir, j’ai enrichi le cadre heuristique Multi Level Perspective -MLP- d’une lecture institutionnaliste plus étoffée, intégrant en particulier des développements sur l’articulation de différents registres de règles à différentes échelles dans le pilotage du changement institutionnel et des développements mésoéconomiques de la Théorie de la régulation. J’ai mis en application ce cadre pour éclairer la transition du secteur laitier (bovin lait) français. Pour cerner cette dynamique d’action collective sous-jacente à la transformation technique, la thèse se penche sur les dispositifs collectifs, i.e. les cadres organisationnels et institutionnels que les acteurs utilisent pour se coordonner, innover, négocier et instituer des nouvelles règles au service de modes de production et de consommation plus durables. Sont étudiés un processus de négociation d’une politique publique agricole, la transformation sur le temps long des systèmes d’information numériques qui structurent l’activité du secteur laitier, et la structuration de dispositifs collectifs de gestion de ressources productives sectorielles. Il ressort de l’analyse que le régime sociotechnique du secteur laitier est éclaté, entre un régime qui développe des ressources pour améliorer ses pratiques sans remise en cause du système d’acteurs et des clés de répartition de la valeur et des niches d’innovation et de marché qui se multiplient mais restent marginales. |
The thesis aims to identify the collective action mechanisms through which agroecology could generate new levers for creating and capturing value for livestock farmers, thereby promoting a sectoral transition. To address this, this thesis highlights the role of three sets of rules (cognitive, normative, and regulative) at different levels in reconfiguring the system of actors and resources, which would be beneficial to livestock farmers in terms of added value created and captured. I therefore propose the concept of institutionalized socio-technical compromise. This concept makes it possible to account for the fact that socio-technical transition processes involve processes of valorization and appropriation underpinned by power relations between actors. To achieve this, I have enriched the Multi-Level Perspective (MLP) heuristic framework with a more substantial institutionalist reading, integrating in particular developments on the articulation of different registers of rules at different scales in the steering of institutional change and mesoeconomic developments in Regulation Theory. I applied this framework to shed light on the transition of the French dairy sector (dairy cattle). To understand the collective action dynamics underlying technical transformation, the thesis examines collective mechanisms, i.e., the organizational and institutional frameworks that actors use to coordinate, innovate, negotiate, and establish new rules for more sustainable modes of production and consumption. The study examines the negotiation process for a public agricultural policy, the long-term transformation of the digital information systems that structure the dairy sector's activity, and the structuring of collective mechanisms for managing sectoral productive resources. The analysis shows that the socio-technical regime of the dairy sector is fragmented, between a regime that develops resources to improve its practices without questioning the system of actors and the keys to value distribution, and niches of innovation and markets that are multiplying but remain marginal. |