Soutenance de thèse de Florian ALBA

Le Serment d'honnêteté et ses implications en psychologie du témoignage


Titre anglais : The honesty Oath and its implications in the psychology of testimony
Ecole Doctorale : CLESCO - Comportement, Langage, Éducation, Socialisation, Cognition
Spécialité : Psychologie
Etablissement : Université Toulouse II Jean Jaurès
Unité de recherche : UMR 5263 - CLLE - Unité Cognition, Langues, Langage, Ergonomie
Direction de thèse : Jacques PY- Céline LAUNAY


Cette soutenance aura lieu mardi 16 septembre 2025 à 13h00
Adresse de la soutenance : 5, allées Antonio-Machado, 31100, Toulouse - salle D31

devant le jury composé de :
Jacques PY   Professeur des universités   Université Toulouse - Jean Jaurès   Directeur de thèse
Vincent DENAULT   Assistant professor   Université de Montréal   Rapporteur
Benoît TESTÉ   Professeur des universités   Université Rennes 2   Rapporteur
Maïté BRUNEL   Maîtresse de conférences   Université de Lille   Examinateur
Céline LAUNAY   Maîtresse de conférences   Université Toulouse - Jean Jaurès   CoDirecteur de thèse
Stéphane LUCHINI   Chargé de recherche   Aix-Marseille School of Economics   Examinateur
Alain SOMAT   Professeur des universités   Université Rennes 2   Examinateur
Daniel GILIBERT   Professeur des universités   Université Paul Valéry   Examinateur


Résumé de la thèse en français :  

Le témoignage oculaire joue un rôle central dans les procès, mais sa fiabilité est soumise à de nombreuses influences. Celles-ci se répartissent entre des variables estimatrices (liées à la mémoire et aux biais cognitifs) et des variables systèmes (contrôlables par le système judiciaire). Parmi ces dernières, le serment du témoin, acte solennel engageant moralement et socialement le témoin à dire la vérité, pourrait renforcer la sincérité et la qualité des déclarations.
Cette thèse explore dans quelle mesure ce serment d’honnêteté améliore la fiabilité des témoignages. La première étude, une Scoping Review, révèle que le serment a été considérablement étudié en économie expérimentale, alors qu’il demeure peu exploré en psychologie légale. Les résultats suggèrent que le serment peut encourager la sincérité en augmentant la charge cognitive du mensonge, mais son effet varie selon les contextes et les croyances individuelles.
Les études 2a et 2b analysent les représentations sociales du serment chez des gendarmes, futurs magistrats et potentiels jurés. Malgré sa sécularisation, le serment reste perçu comme un acte de vérité et d’engagement. Toutefois, ses significations varient selon les profils : les gendarmes semblent l’associer à un devoir professionnel, et les auditeurs de justice y verraient plutôt un rituel symbolique. L’âge et l’ancienneté dans des fonctions d’investigation augmentent également la confiance dans son efficacité.
Les études 3a et 3b étudient l’effet du serment sur la qualité du témoignage, mesurée par l’exactitude, la précision et la certitude des réponses. Les résultats convergent : le serment n'a pas d'impact sur les performances des témoins, ni sur les autres indicateurs. Toutefois, certaines tendances émergent. Le serment ne renforce pas de manière significative la relation entre la confiance et l’exactitude des réponses. Toutefois, il influence les stratégies métacognitives des témoins : ceux-ci font preuve de plus de prudence, s’abstenant davantage lorsqu’ils doutent.
L’étude 4 se focalise sur l'influence d'un serment d'honnêteté sur l'occurence des comportements mensongers. Face à un dilemme entre loyauté prosociale et intégrité scientifique, la majorité des participants ont préféré mentir, qu’ils aient prêté serment ou non. Une possibilité est que la loyauté et l'identification sociale aient neutralisé l’impact du serment. Par ailleurs, des évaluateurs ont jugé plus crédibles les témoignages mensongers formulés sans serment que ceux prononcés sous serment. La diminution de certains indices liés à la crédibilité dans le discours de ces derniers pourrait indiquer que le serment accroît la charge cognitive du menteur, rendant plus difficile la construction d’un discours mensonger crédible.
Cette thèse souligne les limites ainsi que les modalités d'action du serment d’honnêteté, ouvrant la voie à un usage mieux adapté. Les résultats montrent que le serment ne peut être considéré comme une garantie suffisante de sincérité. Il est crucial de prendre en compte la complexité des facteurs psychologiques, sociaux et moraux qui influencent les déclarations des témoins. En combinant plusieurs stratégies, il serait possible d’améliorer la fiabilité des témoignages et, par conséquent, de renforcer l’efficacité du système judiciaire.

 
Résumé de la thèse en anglais:  

Eyewitness testimony plays a central role in legal proceedings, but its reliability is subject to numerous influences. These influences can be divided into estimator variables, which are related to memory and cognitive biases, and system variables, which can be controlled by the judicial system. Among the latter, the witness oath, a solemn act that morally and socially commits the witness to tell the truth, may enhance the sincerity and quality of statements.
This thesis explores the extent to which an honesty oath improves the reliability of testimonies. The first study, a scoping review, reveals that the oath has been extensively studied in experimental economics but remains has received limited attention in legal psychology. Findings suggest that the oath can promote honesty by increasing the cognitive load of lying, although its effect varies depending on context and individual beliefs.
Studies 2a and 2b examine the social representations of the oath among police officers, future judges, and potential jurors. Despite its secularization, the oath is still perceived as an act of truth and commitment. However, its meaning varies according to the profile: police officers tend to associate it with professional duty, while trainee magistrates see it more as a symbolic ritual. Age and experience in investigative roles seem also to increase confidence in its effectiveness.
Studies 3a and 3b investigate the effect of the oath on the quality of testimony, measured through accuracy, precision, and confidence. The findings converge: the oath does not significantly affect witness performance nor other relevant indicators. However, certain trends can be observe. The oath does not significantly strengthen the relationship between confidence and accuracy. Nevertheless, it does affect witnesses’ metacognitive strategies: they display greater caution and are more likely to abstain when uncertain.
Study 4 focuses on the influence of an honesty oath on lying behavior. Faced with a dilemma between prosocial loyalty and scientific integrity, most participants chose to lie, whether or not they had taken an oath. One possible explanation is that social identification and loyalty may override the oath’s impact. Moreover, evaluators rated dishonest testimonies given without an oath as more credible than those given with an oath. The reduced presence of credibility-related cues in the speech of oath-takers may suggest that the oath increases the cognitive load on liars, making it harder to construct a credible deceptive narrative.
This thesis highlights the limitations as well as the modes of action of the honesty oath, paving the way for a better-adapted use. The results show that the oath cannot be considered a sufficient guarantee of sincerity. It is crucial to take into account the complexity of psychological, social, and moral factors that influence witnesses' statements. By combining multiple strategies, it would be possible to improve the reliability of testimonies and, consequently, strengthen the effectiveness of the judicial system.

Mots clés en français :Serment, Témoignage, Mensonge, Mémoire, Certitude, Crédibilité,
Mots clés en anglais :   Oath, Testimony, Deception, Memory, Confidence, Credibility,