L’objectif de cette thèse est d’étudier la stabilité linéaire d’un écoulement représentatif d’un tourbillon de sillage généré par un aéronef. Le modèle retenu est celui du q-vortex qui résulte d’une approximation parallèle du tourbillon de Batchelor (1964), auquel on superpose un profil de masse volumique variable. L’analyse de stabilité est conduite en deux temps au moyen de deux méthodes de complexité croissante. La première, l’analyse de stabilité linéaire modale, permet la recherche des modes les plus amplifiés aux temps longs via la résolution d’un système aux valeurs propres. Compte tenu de la stationnarité et de la double homogénéité spatiale du champ de base, cette méthode s’avère efficace et peu coûteuse ce qui permet une exploration exhaustive de l’espace des paramètres du problème. La seconde méthode, l’analyse de stabilité linéaire non-modale, permet la recherche de mécanismes de croissance transitoire aux temps courts via un processus d’optimisation basé sur une approche directe-adjointe. L’utilisation de
cette méthodologie se justifie par le caractère non normal de l’opérateur de Navier–Stokes.
Dans la première partie, l’analyse de stabilité linéaire modale tridimensionnelle du q-vortex est étudiée. Cette analyse met en lumière la modification substantielle de la stabilité du q-vortex par l’ajout d’un profil de masse volumique variable. Lorsque le cœur du tourbillon est plus lourd que l’environnement extérieur, le domaine d’instabilité, limité en situation homogène, aux faibles nombres de swirl (q < 1.5), est étendu aux grands nombres de swirl. Les instabilités associées présentent de forts taux d’amplification et reposent sur le mécanisme de l’instabilité de Rayleigh–Taylor (RTI), déjà identifié à nombre de swirl infini pour le tourbillon de Lamb–Oseen (Joly et al. , 2005). À l’inverse, la présence d’un cœur léger stabilise l’écoulement pour les grands nombres de swirl. L’effet du rapport Ɛ des rayons des profils de vorticité et de masse volumique dépend des autres paramètres. Aux grands nombres de Reynolds et de swirl, le
taux d’amplification augmente continûment avec Ɛ. En revanche, aux petits nombres de swirl (pour toute valeur de Reynolds) ou aux grands nombres de swirl uniquement à faible Reynolds, la réponse à la concentration du profil de masse volumique au centre du tourbillon n’est pas monotone et il existe une valeur optimale de ce rapport proche de Ɛ ≈ 2.
La deuxième partie de la thèse se focalise sur l'analyse de stabilité linéaire non-modale de l'écoulement. Ce type d'analyse n'ayant pas encore été déployée pour des écoulements tourbillonnaires avec une variation radiale de masse volumique, l'étape de validation a impliqué le développement d'un code de calcul des perturbations adjointes. Ces modes adjoints correspondent aux excitations optimales conduisant à un gain d'énergie maximal aux temps longs, ils sont présentés succinctement. La sensibilité du problème d'optimisation au choix de la norme énergétique, des conditions initiales et du champ de base est étudiée. Sur ce dernier point, une modélisation instationnaire de l'écoulement de base est considérée via une simulation non linéaire initialisée à partir du q-vortex à masse volumique variable. À très grands nombres de Reynolds, la diffusion visqueuse est négligeable et l'écoulement peut être considéré comme stationnaire et correctement approximé par la solution analytique initiale. Ce n'est en revanche plus le cas à des nombres de Reynolds modérés pour lesquels le champ de base devient instationnaire. L'approximation stationnaire par le champ de base analytique est donc moins adaptée pour ce régime. On analyse enfin la variation de la perturbation optimale aux différents paramètres de l'écoulement. En particulier, le mécanisme de croissance transitoire de Orr (par cisaillement longitudinal et azimutal) est identifié comme le principal mécanisme responsable de l'augmentation du taux de croissance de la perturbation aux temps courts. |
The aim of this PhD thesis is to study the stability of a flow representative of trailing vortices generated by aircraft. To this end, two methods of increasing complexity have been used to analyse the stability of the q-vortex model, an approximation of the Batchelor (1964) vortex with the addition of a variable density profile. The first one, the modal linear stability analysis, allows to find the most amplified modes by solving an eigenvalue problem. Given the stationarity and double spatial homogeneity of the base flow field, this method is computationally efficient, allowing a thorough exploration of the problem's parameter space. The second method, the non-modal linear stability analysis, deals with the potential for transient growth mechanisms using a direct-adjoint approach. The use of this methodology is justified by the non-normal character of the Navier–Stokes operator.
In the first part, the three-dimensional modal linear stability analysis of the q-vortex is studied. This analysis shows that the vortex stability is substantially modified by the presence of a variable-density profile. When the vortex core is heavier than the external environment, the instability domain, limited to low swirl numbers (q <1.5) in the constant density case, is extended to high swirl numbers. The associated instabilities exhibit high amplification rates and are associated to the Rayleigh–Taylor instability (RTI) mechanism, already identified at infinite swirl numbers for the Lamb–Oseen vortex (Joly et al., 2005). Conversely, the presence of a light core stabilises the flow for large swirl numbers. The effect of the vorticity-to-density radius ratio Ɛ depends on the other parameters. At high Reynolds and swirl numbers, the amplification rate increases continuously with Ɛ. On the other hand, at low swirl numbers (for any Reynolds value) or at high swirl numbers only at low Reynolds, the response to the concentration of the density profile at the centre of the vortex is not monotonic, and there is an optimum value for this ratio close to Ɛ ≈ 2.
The second part of the thesis is devoted to the non-modal linear stability analysis of the flow. As this type of analysis had not yet been carried out on a vortex flow with a radial variation of density, the code validation step involved the development of a modal code for determining the adjoint perturbations. These adjoint modes correspond to the optimal excitation leading to maximum energy gain at long times, they are presented briefly. The sensitivity of the optimisation problem to the choice of the energy norm, the initial conditions and the base flow field is studied. Considering the latter, an unsteady modelling of the base flow is conducted via nonlinear simulations initialised from the variable-density q-vortex. At very high Reynolds numbers, viscous diffusion is negligible and the flow can be considered stationary and correctly approximated by the initial analytical solution. However, this is no longer the case at moderate Reynolds numbers, where the base flow becomes unsteady. Approximation via the steady analytical q-vortex-like solution is therefore less suitable for this regime. Finally, the variation of the optimal perturbation at different flow parameters is analysed. In particular, the Orr mechanism for transient energy growth is identified as the main mechanism responsible for the increase in perturbation growth rate at short times. |